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Virgil Murder

PUBLIUS VERGILIUS MARO : 70 B.C. - 19 B.C.

Virgil-murder
Les poètes latins

  • Le péché de Polydore (Aen. III.13 – 68)
  • Ecrit le : 07-04-2011 23:30:10 par Michael J. Taylor
  • La logique se maintient en quelque sorte, même dans le royaume des fées. L’état affreux de Polydore nous fait penser aux supplices des malfaiteurs dans Hadès, ou de Prométhée. Alors, quel dieu a-t-il offensé ? On ne nous le dit pas, ni Énée, ni Polydore, ni Virgile comme narrateur. Un tel châtiment, ne doive-il pas expier un péché extraordinaire ? Ce pauvre Polydore, se trouve-t-il enseveli sous un tertre (ou dans un tombeau), ou converti en myrte ? En tous cas, il vit encore, en dépit d’être tué : Ille [Polymestor] . . . Polydorum obtruncat (vv 53, 55). Ce mot obtruncat (il tronque) suggère que avant son meurtre Polydore s’assimile déjà à un arbre en buisson. (Dans la tragédie de Euripide, Polymestor jette Polydore d’un rocher.) Quelle est, précisément, la position de Polydore, qui l’a transformé en monstre (horrendum . . . monstrum, v. 26) ? Premièrement parait-il qu’il est un corps – un corps vif-mort - enseveli sous un arbre, ou un arbre en buisson, car Énée, en déracinant le myrte à poignée (« silvam », v. 24), faisait jeter du sang. (ruptis radicibus . . . liquuntur sanquine guttae, vv. 28-29.) Au second essai l’arbre saigne de son tronc (sequitur de cortice sanguis, v. 33), donc cet arbre est apparemment le corps même de Polydore. Pourtant au troisième essai, une voix s’écrie de fin fond (imo/auditur tumulo, vv. 39-40), qui se dépeint comme l’engrais à contrecœur de ces pousses cruelles (hic confixum ferrea texit/telorum seges et iaculis increvit acutis, vv. 45-46). Coup de vague, Énée et son compagnons enterrent – encore ! – Polydore (instauramus Polydoro funus, v. 62). Pour mettre le comble aux obsèques, ils ensevèlissent son âme (animamque sepulcro/condimus, v. 67-68), un procédé qui reste, au point de vue religieuse, sur terre peu solide, comme vous avez remarqué dans « L'Énéide sous l'Énéide. » Alors, si l’histoire manque de la consistance, on cherche de sens allégorique. On est dans la terre de Thrace, donc conclut-on que le Lycurgus cité en v. 14 est certainement le roi des Edones en Thrace, pas le fameuse législateur de Sparte, en dépit de l’épithète Mavortia, v. 13 (martiale) pour sa terre. Terra . . ./. . . acri quondam regnata Lycurgo. « Acer » - aigu, intelligent, ou malin ? Aigu, au pied de la lettre, car il a haché son fils à mort quand, rendu fou par le dieu Dionysios, dont les rites il voulait supprimer, il l’a pris pour un bouquet de lierre, la plante emblématique de ce dieu. Le peuple tua Lycurgus par ordre de Dionysos, qui est aussi le dieu de l’inspiration poétique. Bouquet de lierre, arbre de myrte . . . Aeneas/Augustus imite Lycurgus. « Que nous, les poètes, souhaitions un sort similaire pour notre roi ! » peut être la leçon de Virgile. Le péché de Polydore, qu’était-il que de personnifier les vertus d’antan des Romains, dès lors enterrées? C’est la victoire « du régime mis en place par Auguste pour enterrer définitivement la république en ayant l'air de la perpétuer, pour étouffer la spiritualité sous couvert de la sauver. » - L'Énéide sous l'Énéide. Avec une inclination de tête à Sigmund Freud, notons que Énée voulait dédier sur ce tertre/tombeau un autel à Venus, laquelle il ne nomme que discrètement comme sa mère, fille de Dione (v. 19). Il s’agit du mons Veneris. - mjt
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  • Ecrit le : 11-04-2011 15:31:50 par Visiteur
  • Comme vous l'indiquez bien, le vers 14 place l'épisode thrace sous le signe de Lycurgue, ce roi violent et "acéré" comme le fil de l'épée (acri), qui osa défier Dionysos. Le meurtre de Polydore par son beau-frère Polymestor reproduit celui du jeune Dryas par son père Lycurgue (obtruncat, 55 évoque la hache que celui-ci utilisa à cette occasion), et est lui-même renouvelé par l'acharnement d'Enée (le narrateur) contre le mort qui n'est pas mort. Et de même qu'en mutilant le propre corps de son fils, Lycurgue croyait arracher la vigne, de même Enée s'imagine-t-il (mais attention, Virgile ne le cautionne pas) en train d'arracher des buissons de myrte (uiridem ab humo conuellere siluam, 24), alors qu'il met en pièces son innocente victime. En décidant d'enfermer dans la tombe l'âme de celle-ci (animamque sepulchro / Condimus, 67-68), Enée/Auguste voudrait étouffer la voix de sa conscience, mais c'est naturellement en vain: "L'oeil était dans la tombe et regardait Caïn".- jym
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